Zoom sur Carl Sheard, éleveur de porcs labellisé Bio Cohérence : toujours à la recherche d’innovation pour le plus grand bonheur de ses « cochons bleus »

En France, plus de 8 animaux sur 10 vivent dans un élevage intensif. Ce chiffre alarmant pousse les consommateurs à modifier leur comportement. Ils diminuent voire suppriment la viande de leur assiette. Ils se tournent aussi vers des labels mieux-disants. Et Bio Cohérence en fait partie. Nos adhérents ont à cœur d’offrir à leurs bêtes les meilleures conditions de vie possibles. Cela donne du sens à leur métier. Après avoir révisé les principes du bien-être animal, nous verrons comment ceux-ci sont appliqués en bio. Et nous découvrirons l’exemple de Carl Sheard et de ses porcs, élevés dans des parcs agroforestiers.

Le bien-être animal : définition et valeurs

Selon l’Anses, l’Agence nationale de sécurité sanitaire, il s’agit de « l’état mental et physique positif lié à la satisfaction de ses besoins physiologiques et comportementaux, ainsi que ses attentes. Cet état varie en fonction de la perception de la situation par l’animal. »

Depuis 1965, l’Organisation mondiale de la santé animale (OMSA) a défini les 5 libertés fondamentales de l’animal :

  • Absence de faim, de soif et de malnutrition ;
  • Absence de peur et de détresse ;
  • Absence de stress physique ou thermique ;
  • Absence de douleur, de lésions et de maladie ;
  • Possibilité pour l’animal d’exprimer les comportements normaux de son espèce.

Ces libertés sont de la responsabilité de l’Homme lorsqu’il a la charge de ces animaux.

Or, on ne compte plus les dérives de notre système alimentaire en la matière. Des maltraitances font régulièrement la une des journaux. Elles concernent aussi bien les conditions d’élevage que d’abattage, en passant par le transport.

Nous avons tous vu des images de poules en cage. Nous connaissons tous « la ferme des 1000 vaches ». Et pour les plus courageux, nous avons visionné ces vidéos douloureuses, filmées à l’intérieur de certains abattoirs.

Pour nous, à Bio Cohérence, le confort des animaux est essentiel tout au long de leur vie. Cela donne du sens au métier d’éleveur. Nos adhérents s’assurent de faire naître et grandir des bêtes dans les meilleures conditions possibles.

À lire : nos 10 engagements pour une agriculture paysanne 100 % bio et 100 % France

En élevage biologique : des améliorations significatives

Le cahier des charges européen de l’agriculture biologique va plus loin que les règles minimales appliquées en conventionnel.

Dans certains élevages « standard », les animaux ne voient jamais la lumière naturelle du jour. Ils ne vont jamais à l’extérieur. D’autres sont enfermés dans des enclos, parfois attachés toute leur existence. La qualité de leur nourriture n’est pas garantie. Et lorsqu’ils sont malades, ils reçoivent de nombreux traitements allopathiques (antiparasitaires, antibiotiques et vaccins).

Soyons bien conscients des différences majeures entre bio et conventionnel. Elles sont déjà énormes !

Les éleveurs bio doivent prendre des mesures pour réduire au maximum la souffrance animale tout au long de la vie. Les conditions d’élevage sont strictement encadrées :

  • moindre densité des animaux par bâtiment ;
  • taille des élevages réglementée ;
  • accès à un parcours extérieur ;
  • accès à une alimentation biologique certifiée ;
  • espace intérieur aéré, avec lumière naturelle, paillé pour qu’ils puissent se mouvoir librement ; 
  • prévention des maladies.

Ce sont les organismes certificateurs qui vérifient le respect de ces normes.

En bio, les avancées sont notables. Cependant, certains éleveurs souhaitent aller plus loin. Ils veulent travailler au « meilleur-être » de leurs bêtes à travers une alimentation plus locale et plus diversifiée. Ils se questionnent aussi sur la gestion du plein air. Ils innovent pour garantir une viande de meilleure qualité.

Chez Bio Cohérence : l’exemple innovant de Carl Sheard

Carl Sheard est le propriétaire de la Ferme du Cochon Bleu dans le Maine-et-Loire (49). Il élève des porcs en plein air avec un fort engagement dans le respect du bien-être animal.

Carl est arrivé en Anjou en 1990 en louant une ferme pendant quelques années avant de s’installer à Noyant-la-Gravoyère. Sa ferme de 46 hectares est certifiée bio depuis plus de 20 ans et labellisée Bio Cohérence depuis 2021.

Il possède 45 truies, issues d’un croisement de races anglaises : les « Large white », une race ancienne connue pour être la reine du plein air et les « Saddleback », une race moins grasse. Ce mélange donne des animaux rustiques appelés « cochons bleus » en raison de leur belle couleur gris bleutée. Ils sont surtout adaptés à l’élevage en plein air avec une excellente qualité de viande.

Les truies mettent bas en plein air, dans des cabanes. Les porcs sont ensuite répartis dans les différents parcs en fonction de leur âge. Durant la phase dite de finition, les animaux reviennent alors en bâtiment avec un accès extérieur.

Carl vend la viande au groupement d’éleveurs Bio Direct ainsi qu’à des particuliers qui apprécient la qualité de vie de ses cochons. Elle correspond à leur vision de la bio !

Chez Carl Sheard : l’innovation au service des animaux

Pour Carl, le cahier des charges européen de l’agriculture bio est trop laxiste concernant les conditions d’élevage. Il est difficile de maintenir la crédibilité de la filière sans mieux prendre en compte ces aspects. Il souhaite que la bio apporte plus de garanties au consommateur.

Sa ferme se veut donc plus autonome avec un haut niveau de bien-être animal et une qualité optimale de la viande. Ce sont ses objectifs.

Pour les atteindre, il fait partie d’un projet européen appelé Agromix, piloté par l’ITAB, l’Institut Technique de l’Agriculture Biologique. Celui-ci étudie l’intégration de l’agroforesterie et l’utilisation des fourrages dans les systèmes d’élevage porcin. Son but :

  • développer le bien-être et la santé des animaux grâce à un accès aux parcelles arborées ;
  • diversifier la nourriture des porcs, limiter les achats d’aliments, améliorer la qualité nutritionnelle de la viande.

Carl a procédé à divers essais. Aujourd’hui, il cultive un mélange de luzerne, fétuque élevée, trèfles, ray-grass, chicorée (dont les cochons raffolent !) et plantain.

Les arbres ont été sélectionnés pour être adaptés aux conditions pédoclimatiques de la ferme de Carl et pour résister aux aléas des années à venir. Il a planté différentes espèces de chênes, des mûriers, des érables, des féviers d’Amérique, des châtaigniers, des merisiers, des noyers entre autres. Plus de 600 arbres au total, et ce n’est pas fini !

Carl parle d’une énorme satisfaction de pouvoir voir ses cochons s’épanouir au grand air. Il les trouve heureux. En effet, ses porcs ont été comparés à une population témoin. Les résultats sont sans appel : des animaux plus calmes, moins sales et en meilleure santé digestive.

Dans le cadre du projet Agromix, il accueille régulièrement des ateliers collaboratifs sur sa ferme. Ceux-ci sont composés d’experts en production fourragère, en zootechnie, en agroforesterie et en distribution.

Les chercheurs récoltent des données qui serviront de références pour développer ces pratiques. Le pâturage des porcs est peu répandu, encore moins en système agroforestier. Pourtant, il semble qu’il ait un réel avenir.

Si l’élevage standard a d’énormes progrès à faire en matière de bien-être animal, la bio offre déjà des remparts contre certaines dérives. À Bio Cohérence, nous pensons qu’il est possible — et souhaitable — de faire mieux. L’exemple de Carl Sheard nous montre que l’expérimentation est la clé pour adapter les structures. Non seulement pour garantir plus de sécurité alimentaire au consommateur, mais aussi pour accompagner les fermes face aux changements climatiques à venir. Ses arbres sont encore jeunes, mais d’ici quelques années, l’apport de fourrage, l’effet brise-vent et l’ombrage devraient encore améliorer la vie de ses cochons bleus.

 

Vous souhaitez savoir où trouver des producteurs Bio Cohérence près de chez vous, rendez-vous sur notre carte des Bio Cohérents.

 

Nous tenons à remercier Carl Sheard, de la Ferme du Cochon Bleu d’avoir accepté ce portrait et Clémence Berne, chargée de mission à l’ITAB, pour les précisions qu’elle nous a apportées.

 

Article rédigé par Cécile Cardeillac

 

Sources :

AGROMIX | L’agroforesterie en France | Blue Pig Farm

ITAB : Pâturage des porcs charcutiers

ANSES : Définition du bien-être animal

Bien-être animal : les 5 libertés fondamentales

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